
«La protection des plantes est une technique civilisatrice»
À la fin du 19e siècle, les produits phytosanitaires de synthèse ont permis de mettre un terme aux épisodes de famine et d’entrer dans l’ère de la sécurité alimentaire. Pour le professeur Andreas von Tiedemann de l’Université de Göttingen, c’est une certitude: les produits phytosanitaires font partie des éléments fondateurs d’une société moderne.
vendredi 15 janvier 2021
L'essentiel en bref
- Les produits phytosanitaires ont été un outil décisif sur la voie de la sécurité alimentaire en Europe.
- Auparavant, les maladies des plantes provoquaient régulièrement de mauvaises récoltes et des famines.
- Les produits phytosanitaires peuvent donc être décrits comme la pierre angulaire d'une société moderne.
L’utilisation de la bouillie bordelaise en France pour lutter contre le mildiou remonte à la fin du 19e siècle. Cette protection phytosanitaire chimique, la première du genre, allait marquer un tournant dans l’agriculture. À partir de ce moment-là, il devenait possible de protéger activement les cultures contre les parasites et les maladies.
Hausse sans précédent de la productivité
Au 20e siècle, la sélection végétale, les engrais minéraux, de nouvelles techniques de culture et de récolte et la protection phytosanitaire chimique ont été à l’origine de la hausse sans précédent de la productivité dans l’agriculture. Depuis les années 1950, les récoltes de maïs ont pu être multipliées par quatre, celles de riz par trois, et celles de soja et de blé par deux (par unité de surface). Sur une surface cultivée qui n’a pratiquement pas varié, il a été possible de nourrir une population mondiale en forte croissance. Aujourd’hui, la Terre compte quelque 7,5 milliards d’êtres humains, contre près de 2,7 milliards au début des années 1950. Plus de 60% des habitants de la planète vivent en milieu urbain et travaillent dans le secondaire ou le tertiaire. Grâce à son utilisation efficace des ressources, l’agriculture productive a également favorisé l’industrialisation, puis l’avènement de la société de services.
Certes, les produits phytosanitaires n’augmentent pas les rendements directement. Mais ils jouent un rôle central pour protéger les récoltes. Si les plantes n’étaient pas protégées, environ deux tiers des récoltes des principales plantes utiles seraient perdues. Grâce à la protection phytosanitaire, cette part est ramenée à un tiers. Les pesticides permettent aussi de réduire les variations de rendement d’une année à l’autre et d’apporter ainsi une contribution indispensable à la sécurité alimentaire. La protection phytosanitaire permet aussi de réduire la consommation d’eau, de nutriments, d’énergie et de sol.
La protection phytosanitaire assure un besoin fondamental
Sans protection des cultures, les quantités de fruits seraient aussi très variables. Les personnes en situation de précarité ne pourraient pas avoir régulièrement sur la table des fruits et des légumes frais. Les pommes de terre ne se trouveraient en magasin que durant les années climatiquement favorables. Et il faudrait presque complètement renoncer au vin, à la bière et au café. La culture des agrumes ou des bananes deviendrait pratiquement impossible.
L’accès à l’alimentation est un besoin fondamental et même un droit humain selon les Nations Unies. En protégeant les rendements, la protection phytosanitaire contribue à la sécurité alimentaire. Pour von Tiedemann, c’est une certitude: «La protection phytosanitaire moderne assure un besoin fondamental de l’être humain. Elle est une technique civilisatrice, au même titre que la médecine et les technologies dans les domaines de la mobilité, de l’énergie et de la communication.»
Les pesticides sont indispensables en matière de santé publique
Contrairement aux allégations non scientifiques colportées dans la presse et les milieux politiques, les pesticides sont des outils vitaux qui, à l’instar des vaccins, des antibiotiques et de l’assainissement de l’eau, ont permis d’améliorer la qualité de vie et la sécurité alimentaire et rendu possible une augmentation sans précédent de l’espérance de vie (de trente ans). Tel est le constat de S. Eliza Dunn dans la contribution disponible sous ce lien.
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